Parler, bien communiquer, savoir prendre sa place, accueillir ses émotions, apprivoiser son stress, se sentir…
L’étymologie de « communiquer » vient du latin « communicare », qui signifie « mettre en commun ». Quand nous nous adressons à quelqu’un : un auditoire, un collègue, un collaborateur, un ami… ce « quelqu’un » doit être considéré et inclus dans notre prise de parole. Il doit se sentir exister et regardé. Parler devant un auditoire, quel qu’il soit, nécessite en effet d’être à l’écoute de l’autre. C’est un acte engagé et engageant, en ce sens qu’il doit impliquer les personnes qui nous écoutent.
Au-delà de la voix, du regard, du rythme, de l’intonation vocale, de la posture, de la présence… et j’en passe… nous oublions une alliée essentielle, une respiration cruciale : la ponctuation !! Y compris dans un texte dit, énoncé, et pas seulement lu.
Amusez-vous à lire à haute voix le texte que vous êtes en train de lire. Respectez-vous les virgules, les points, les points d’exclamation ou d’interrogation ? Faites-vous des pauses, des micro silences, des modulations vocales ? Etes-vous dans le texte, dans son contenu ? Comprenez-vous véritablement, avec toute votre attention, ce que vous lisez ? Ou lisez-vous à toute vitesse la phrase d’après sans même profiter de la phrase présente ?
Un certain nombre de personnes (beaucoup trop !) parlent sans ponctuer, sans silence, en ne respectant pas les suspensions et respirations du texte, entamant la phrase suivante en la coupant au mauvais endroit… Cela peut donner un sens totalement différent à leurs propos. Illustration avec cet exemple trouvé dans le blog du journal « Le monde » d’avril 2006 intitulé « une virgule, et tout bascule » :
« En 1649, le général Fairfax, lieutenant de Cromwell, devait signer l’ordre d’exécuter le roi Charles Ier d’Angleterre. Inquiet des conséquences possibles de son acte, il prit soin de faire précéder son paraphe d’une phrase en latin « “Si omnes consentiunt ego non dissentio » sans ponctuation, ce qui en laissait le sens ouvert, à charge pour les récipiendaires de l’interpréter. Exercice périlleux : avec une virgule devant « ego », on comprend : “Si tous acceptent, moi je ne m’oppose pas”. En ajoutant une seconde virgule après « non » : “Si tous acceptent, moi pas, je m’oppose”.
La démonstration est faite ! Une simple virgule peut donc changer la compréhension du texte ! Poussé à l’extrême, voyez comme cela peut être lourd de conséquences !
Marquer la respiration d’une ponctuation, c’est mettre du sens dans son texte (lu ou dit). En respectant le rythme de notre parole, nous laissons l’autre ou les autres rentrer dans notre texte et prendre la mesure de ce que nous exprimons. Nous rendons accessible et « mettons en commun ». Nous devenons communiquant. Nous multiplions notre capacité à être présent et nous désamorçons le « pilote automatique ». Nous faisons monter la «puissance dramatique» de notre intervention. Nous incarnons notre posture d’orateur. Nous prenons avec plus de facilité notre place, aidés par l’implication et l’élan de vie que nous mettons dans notre intervention au fur et à mesure que nous parlons.
Prendre la parole, c’est décider de donner de l’importance à ce que l’on dit. « Zapper » le rythme de sa parole en faisant abstraction de la ponctuation ou en la négligeant, c’est risquer la monotonie, la surexcitation, la fuite, l’absence d’échange.
Posons-nous la question suivante : est-ce que je m’autorise à mériter d’être entendu(e) ?
Nous apercevrions-nous que nous voulons faire « au plus vite » quand nous parlons ?, quitte à négliger (même inconsciemment) qu’il y a des personnes en face de nous, voire venues expressément pour nous ou pour la cause que nous défendons ?
En décidant de prêter attention à ce que nous disons, lisons, exprimons, nous redonnons à la ponctuation ses lettres de noblesse 🙂 . C’est en grande partie elle qui crée et favorise l’échange et l’écoute. C’est également elle qui nourrit le sens et la réflexion.
On prête à Francis Scott Fitzgerald la phrase suivante : « La ponctuation, ce n’est pas de l’orthographe, c’est de la pensée ». J’ajouterais que c’est de la pensée à partager et à « offrir » à celles et ceux à qui nous nous adressons. Cela ne peut donc être fait « à la va vite »…
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